Une percée en génétique jette la lumière sur l’hyperglycémie grave

La découverte avive l’espoir de l'avènement d’une « médecine personnalisée »

Des chercheurs canadiens, français et britanniques ont identifié une séquence d’ADN qui contrôle la variabilité des taux de glucose sanguin chez l’humain. C’est une découverte qui revêt une certaine importance dans la mesure où les taux de glucose sanguin élevés chez des personnes en santé sont souvent des indicateurs de maladies du cœur et de taux élevés de mortalité. Les résultats seront publiés le 1er mai dans la version en ligne du journal Science.

Le Dr Phillippe Froguel et ses collègues du Collège impérial de Londres et du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) à Lille, en France, ont mené cette recherche en collaboration avec le Dr Robert Sladek, le Dr Constantin Polychronakos et leurs équipes de l’Université McGill et du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) à Montréal. Le Dr Ghislain Rocheleau, boursier postdoctoral au laboratoire du Dr Sladek, est copremier auteur de l’étude. Les scientifiques ont utilisé les données d’une vaste étude sur le génome initialement menée pour une recherche sur le diabète et qui avait examiné plus de 390 000 sites différents – ou loci – du génome humain. Publiés en 2007, les premiers résultats importants de l’étude relatifs au diabète ont retenu l’attention des médias du monde entier.

Dans cette étude, les chercheurs ont examiné le code génétique de personnes saines et non diabétiques dont les taux de glucose se situaient à un niveau normal. Ils ont découvert qu’une simple mutation d’ADN dans trois gènes différents expliquait, en partie, pourquoi certains individus souffraient d’hyperglycémie ou d’hypoglycémie. Les chercheurs estiment que ces gènes influent sur le niveau minimal de glucose dans la circulation sanguine, ce qui déclenche la sécrétion d’insuline. Plus le niveau minimal est élevé, plus le taux de sucre augmente avant d’être régulé par l’insuline.

« Ces séquences expliquent à peu près cinq pour cent de la variation normale des taux de glucose sanguin chez les personnes en santé », explique le Dr Sladek, rattaché à la Faculté de médecine de l’Université McGill, au Département de génétique médicale, à l’Institut de recherche du CSUM et au Centre d’innovation Génome Québec et Université McGill. « Cinq pour cent peuvent sembler négligeables, mais c’est beaucoup pour des caractères complexes. Par comparaison, des centaines de gènes différents influencent la taille. »

Les chercheurs estiment que ces constatations apportent des données importantes sur les mécanismes génétiques qui sous-tendent le métabolisme du glucose et permettraient de mieux comprendre le rôle des gènes dans les troubles métaboliques en général. « En théorie, cette approche peut être utilisée dans tout examen médical qui comporte une composante génétique », explique le Dr Sladek. « Cela nous amène à l’idée d’une "médecine personnalisée". Un jour, nous pourrions adapter le traitement à la structure génétique unique d’une personne. »

L’hyperglycémie est par ailleurs étroitement liée à l’augmentation des risques de maladies cardiovasculaires. Ces constatations redonnent l’espoir de découvrir de nouvelles techniques de gestion et de nouveaux traitements. « Il est important de savoir qu’une hyperglycémie, même à un niveau normal chez une personne non diabétique, est un facteur de risque de mortalité précoce », explique le Dr Philippe Froguel, rattaché au Collège impérial et au CNRS. « Selon des études épidémiologiques, 80 pour cent des risques de maladie cardiovasculaire sont attribuables à un niveau de glucose sanguin qui se situe juste au-dessus de la moyenne. »

« Il reste entendu que la prochaine étape consisterait à travailler avec des collaborateurs dans le domaine des maladies du cœur pour déterminer si certains de ces autres gènes peuvent également jouer un rôle », ajoute le Dr Sladek.

Nous sommes fiers de cette annonce qui confirme, une fois de plus, l’excellence scientifique et le talent des chercheurs du Québec », a déclaré Paul L’Archevêque, président-directeur général de Génome Québec. « Ces résultats, qui découlent directement de recherches cofinancées par Génome Québec, démontrent bien le rôle stratégique de la génomique dans la recherche de solutions visant à améliorer la santé humaine. Nous saluons également la collaboration entre les instituts, initiative qui a rendu possible la réalisation de cette avancée importante. Bravo au Dr Sladek et à son équipe! »