Cadence, Ethan et Abigael : trois frère et sœurs, un même diagnostic

Abigael, Ethan and Cadence

Les jumeaux Cadence et Ethan Lenet s’apprêtaient à entrer en maternelle quand leur mère Kerry Howard les a amenés chez l’optométriste pour un examen de la vue. Kerry n’a pas été surprise qu’Ethan, dont un œil regarde vers son nez quand il est fatigué, se voie prescrire des lunettes. Mais elle a été ébranlée quand on a prescrit à Cadence des lunettes aux verres très épais. « J’avais l’impression qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas avec sa prescription, alors j’ai demandé un deuxième avis », raconte-t-elle.    

Kerry s’est tournée vers un ami de confiance de la famille, un optométriste qui ne voit habituellement pas d’enfants, mais qui a accepté d’examiner Cadence et Ethan. Après cet examen, il a incité Kerry à se rendre le plus rapidement possible au département d’ophtalmologie de l’Hôpital de Montréal pour enfants (HME). « Il a mis ses mains sur mes épaules en me regardant dans les yeux, et il a dit “prends immédiatement rendez-vous pour Cadie à la clinique d’ophtalmologie de l’HME” », confie Kerry.

Un diagnostic inattendu

La Dre Ayesha Khan, ophtalmologiste pédiatre, a vu Cadence et a passé beaucoup de temps à l’examiner. « Ça m’a fait paniquer un peu », admet Kerry. La Dre Khan a confirmé que Cadence avait un œdème papillaire, signe de pression intracrânienne, un diagnostic qui a surpris Kerry, parce que Cadence ne s’était jamais plainte de douleur. Quelques semaines après que Cadence eut subi un examen d’IRM, Kerry a été invitée à rencontrer le Dr Roy Dudley, neurochirurgien pédiatre, et l’équipe de neurochirurgie. 

L’IRM de Cadence a permis de confirmer non seulement une élévation de la pression intracrânienne, mais aussi un gonflement des disques optiques et une légère malformation de Chiari, caractérisée par la descente des amygdales cérébelleuses dans le canal rachidien. De plus, la tête de Cadence était quelque peu allongée, ce qui suggérait une craniosynostose. « La première chose que Kerry nous a dite lors du rendez-vous suivant, c’est qu’elle avait elle-même subi deux opérations pour une craniosynostose sagittale dans sa première année de vie. Nous avons donc envoyé Cadence passer une radiographie complète du crâne et une tomodensitométrie 3D de sa tête, et les deux examens ont confirmé la présence d’une craniosynostose à multiples sutures », explique le Dr Dudley.

Présentations différentes, caractéristiques uniques

Autrement, Cadence allait bien; elle n’avait pas de maux de tête ni de vomissements, elle était parfaitement intacte sur le plan neurologique et son développement était normal. Les parents des enfants, Kerry et Adam, racontent qu’ils ne se seraient pas inquiétés pour elle, au contraire de son frère jumeau Ethan et de sa grande sœur Abigael qui se plaignaient souvent de maux de tête.

En raison de ces résultats, Ethan et Abigael ont aussi subi des examens. Même si la forme de la tête d’Ethan était normale, les tests ont révélé qu’il présentait un cas d’œdème papillaire plus léger que Cadence, mais une forme plus sévère de malformation de Chiari. Dans le cas d’Abigael, les tests ont révélé une légère forme d’œdème papillaire, mais une craniosynostose à multiples sutures encore plus marquée que chez son frère et sa sœur, et une absence de malformation de Chiari.

 Gestion des soins

Le cas de chacun des enfants a été traité différemment. Le Dr Mirko Gilardino, un chirurgien pédiatre craniofacial, a opéré Cadence et Ethan avec le Dr Dudley. « Cadence a été opérée avec l’approche la plus conventionnelle, soit une expansion de la voûte crânienne avec du matériel résorbable. Quant à Ethan, il était le candidat parfait pour une distraction de la voûte crânienne postérieure; cela consiste à placer des vis dans le crâne, qui sont utilisées ensuite par les parents pour élargir tranquillement le crâne et générer de la nouvelle matière osseuse », explique le Dr Gilardino. Enfin, pour Abigael, on a convenu que la meilleure approche était de ne pas opérer, mais de la suivre tout au long de sa croissance.     

Hip-hop jusqu’au bloc

La danse hip-hop est l’activité préférée des trois enfants, et grâce au programme de présence parentale à l’induction de l’HME, qui aide les enfants et leurs parents à se préparer aux interventions chirurgicales, Cadence et Ethan ont pu danser au son de leur chanson préférée pour se rendre au bloc opératoire. Cadence a choisi All About That Base de Meghan Trainor tandis qu’Ethan a préféré Can’t Stop the Feeling de Justin Timberlake. « Pour leur entrée au bloc, j’ai fait jouer leurs chansons sur mon iPad, et c’est en dansant qu’ils ont parcouru le corridor. Chaque personne qu’ils ont croisée s’est arrêtée et a dansé. C’était la plus belle chose qu’il m’ait été donné de voir », confie Kerry.

Un pedigree étonnant

Un grand nombre de familles aux prises avec une craniosynostose sont dirigées vers la clinique de génétique pour écarter la cause génétique de cet état. Les Lenet présentent un cas remarquable, parce que Kerry a aussi été opérée en raison d’une craniosynostose étant bébé, et qu’il est plutôt rare qu’autant de membres d’une même famille en soient atteints. Étant donné que tous ses enfants étaient touchés, il était plus que probable que Kerry soit porteuse d’une mutation d’un gène qui cause une craniosynostose, et que cette mutation ait été transmise à ses enfants.

La Dre Natascia Anastasio est la résidente en génétique qui travaille avec la famille. À ce jour, on n’a trouvé aucun gène qui pourrait expliquer le cas des Lenet. L’équipe de génétique a testé environ 20 différents gènes associés à la craniosynostose, et Kerry ne présente aucune mutation sur aucun d’eux. « Nous allons éventuellement progresser avec les nouvelles données qui nous arriveront. La cause de la maladie chez la famille Lenet pourrait être un tout nouveau gène dont le lien avec la craniosynostose n’a pas encore été identifié », explique la Dre Anastasio. 

Quant aux enfants Lenet, ils sont heureux et en santé. Kerry et Adam sont reconnaissants pour les soins que leurs enfants ont reçus et continuent de recevoir. « Toutes les personnes qui se sont occupées de nos enfants occupent une place à part dans nos cœurs. Grâce aux incroyables soins qu’ils ont reçus et qu’ils continuent de recevoir, ils peuvent continuer à danser », ajoute Kerry.