Les médicaments pour le TDAH sont-ils sûrs?

Par Richard Haber, M.D.
 
Madame Tremblay est inquiète. Son fils de 9 ans a des problèmes à l’école, et vous venez de diagnostiquer chez lui un trouble de déficit d’attention avec hyperactivité (TDAH) selon les directives1 de l’American Academy of Pediatrics (AAP). Alors que vous discutez de différentes options, elle vous demande votre opinion sur l’utilisation de stimulants dans le traitement du TDAH. Elle a lu sur Internet qu’ils pouvaient causer une mort subite. Que lui répondez-vous?
 
La prudence est de mise
 
Les médicaments comme le méthylphénidate et les amphétamines, tout comme les médicaments non stimulants comme l’atomoxétine, accélèrent le rythme cardiovasculaire. Bien que cette accélération ne soit pas significative d’un point de vue hémodynamique (3 à 5 battements par minute de fréquence cardiaque; 2 à 4 mm Hg de tension artérielle systolique; et 1 à 3 mm Hg de tension distolique2), ces hausses augmentent les événements cardiaques potentiellement indésirables. Les inquiétudes se sont accrues lorsque la Food and Drug Administration (FDA) des É.-U. a passé en revue les rapports de morts subites survenues entre 1999 et 2003, et a trouvé 25 cas de patients traités avec des stimulants : 8 d’entre eux prenaient du méthylphénidate (7 enfants et 1 adulte) et 17 prenaient une amphétamine (12 enfants et 5 adultes)2. En outre, 43 personnes (26 enfants) ont connu un événement cardiovasculaire comme un accident vasculaire cérébral, un arrêt cardiaque et des palpitations cardiaques. Subséquemment, on a constaté que la plupart de ces enfants souffraient d’une cardiopathie structurelle sous-jacente, bien que cette information n’ait pas été disponible pour tous les patients. Après cela, en 2005, Santé Canada a retiré le médicament Adderall XR du marché, pour le réintroduire 6 mois plus tard avec la mise en garde suivante : « On a rapporté des cas de morts subites associés à un traitement aux amphétamines administré à des doses thérapeutiques chez les enfants atteints d'anomalies cardiaques structurelles. Adderall XR (gélules de sels mixtes d'amphétamine à libération prolongée) ne devrait pas, en général, être prescrit aux patients atteints d'anomalies cardiaques structurelles. » Cette mise en garde a maintenant été ajoutée aux monographies de tous les médicaments stimulants et non stimulants utilisés pour traiter le TDAH. Après une multitude d’articles et de discussions, le consensus dégagé indique que les avantages de traiter le TDAH surpassent de loin les risques2.
 
Dépistage des anomalies cardiaques
 
L’American Heart Association a publié dernièrement de nouvelles recommandations de dépistage avant de prescrire ce type de médicament3. Les directives suggèrent que tous les enfants soient examinés pour dépister une éventuelle maladie cardiaque avant d’entreprendre un traitement du TDAH avec des médicaments stimulants ou non stimulants. Un historique complet et un examen physique devraient accompagner le dépistage. Renseignez-vous sur la présence de signes tels que palpitations, syncopes et arythmies, et sur l’historique familial de mort subite cardiaque. Vérifiez aussi la présence d’anomalies cardiaques — arythmie, souffle cardiaque, tachycardie. Ce qui est nouveau, et plutôt controversé est la recommandation d’ajouter un électrocardiogramme (ECG) au dépistage. Les directives précisent cependant « qu’il n’existe aucun essai clinique pour nous guider sur ce sujet… [et on ignore] si l’approche décrite réduit les risques. » À l’heure actuelle, il n’y a pas de consensus au sujet de l’ECG, mais c’est une histoire à suivre.
 
Références :

1. American Academy of Pediatrics. Pediatrics, vol. 108, no 4, 2001, p. 1033-1044.

2. Wilens T.E. et coll. Pediatrics, vol. 118, no 3, 2006, p. 1215-1219.

3. Vetter V.L. et coll. Circulation, vol. 117, no 18, 2008, p. 2407-2423.
 
Renseignez-vous sur la présence de signes tels que palpitations, syncopes et arythmies, et sur l’historique familial de mort subite cardiaque

Richard Haber, M.D., FAAP et FRCPC, est professeur agrégé de pédiatrie à l’Université McGill et directeur du Centre de consultation pédiatrique à L’Hôpital de Montréal pour enfants.