C’est en forgeant qu’on devient forgeron : un nouveau programme de formation amène des changements positifs au bloc opératoire

Les fréquences cardiaques s’accélèrent alors que les médecins, les infirmières, les inhalothérapeutes et les aides de salle d’opération s’agglutinent autour d’une nouveau-née au bloc opératoire de l’Hôpital de Montréal pour enfants (HME). On a détecté une hémorragie massive dans son petit corps et son état se détériore à vitesse grand V. Les membres de l’équipe doivent réagir vite, sinon ils vont la perdre. « Le temps est écoulé », lance la Dre Lily Nguyen. Tous relèvent la tête et prennent une grande respiration. La simulation de 20 minutes est terminée.

Depuis le printemps 2014, le groupe de travail interprofessionnel sur la simulation périopératoire se rencontre régulièrement pour organiser des simulations pour le personnel du bloc opératoire et de l’USIP. Ce programme est dirigé par la Dre Nguyen, chirurgienne pédiatrique et oto-rhino-laryngologiste, et la Dre Rachel Fisher, du département d’anesthésie, avec l’aide de plusieurs collègues dévoués, incluant l’infirmière-chef adjointe, Antonietta Carriero. « Nous recueillons les commentaires de notre groupe de travail interprofessionnel à chaque étape, car nous ne voulons pas que ces simulations soient dirigées par un médecin. Tout le monde a un rôle important à jouer », souligne la Dre Nguyen.

Le groupe passe plus de 20 heures à organiser chacune des simulations. Un scénario réel est défini, puis une répétition à blanc a lieu au Centre de simulation médicaleArnold et Blema Steinberg (centre SIM) sur l’avenue du Parc, suivie d’une autre répétition à blanc à l’hôpital. Six à sept membres du bloc opératoire et de l’USIP sont ensuite invités à participer à l’exercice lors des séances du lundi matin.

La séance commence par une présentation de 20 minutes, suivie d’une simulation pratique de 20 minutes et d’une séance-bilan de 40 minutes. Pendant la simulation, les intervenants travaillent sur un mannequin de la taille d’un nourrisson, dont l’apparence est si réelle qu’ils peuvent sentir, entendre et voir les changements dans son comportement. « C’est suffisamment réaliste pour que les gens embarquent totalement, précise la Dre Nguyen. Vous pouvez l’intuber, entendre si sa respiration est obstruée et même voir ses pupilles se dilater. » Pendant la simulation, des ingénieurs du centre SIM peuvent modifier la respiration du mannequin, sa fréquence cardiaque et sa tension artérielle, entre autres fonctions vitales. 

À ce jour, huit simulations ont été faites, et deux autres sont prévues avant le déménagement de l’HME au site Glen. « Quand on met ces scénarios au point, on essaie de créer des situations de crise au cours desquelles l’état d’un patient se détériore rapidement et nécessite l’intervention de plusieurs personnes différentes », explique la Dre Nguyen. « La simulation est un environnement sûr où on peut faire des erreurs et en tirer des leçons. Il n’y a pas de jugement porté sur la compétence des intervenants, et leur performance n’est pas notée. Il s’agit d’apprendre, de bâtir un esprit d’équipe et d’améliorer la communication. En nous exerçant régulièrement ensemble, comme une équipe, nous tentons d’offrir à nos patients les soins les meilleurs et les plus sûrs qui soient. »

Les simulations ont aussi aidé l’équipe du bloc opératoire à identifier des problèmes systémiques au bloc. Après chaque séance, l’équipe examine ce qui a bien été et ce qui peut être amélioré. Les problèmes identifiés sont pris en note et portés à l’attention du comité périopératoire. « À ce jour, tous les changements que nous avons suggérés ont été mis en œuvre », rapporte la Dre Nguyen. Récemment, au cours d’une simulation, un code d’urgence factice a été lancé et l’équipe a remarqué qu’il faudrait un certain temps aux membres de l’unité de soins intensifs pour retirer leurs vêtements habituels et enfiler leur combinaison. Le groupe a donc proposé une solution. Pourquoi ne pas laisser les combinaisons d’urgence près des portes à l’extérieur du bloc opératoire? C’est une solution simple qui permet de gagner de précieuses secondes en situation d’urgence. 

Le groupe de travail envisage aussi de mettre en œuvre un comité officiel de simulation pour les hôpitaux pour enfants et pour adultes une fois le site Glen ouvert. Comme plusieurs des erreurs surviennent pendant le transport, l’objectif ultime est d’élaborer un scénario dans lequel le patient doit être déplacé entre différents départements de l’HME. « Nous voulons faire ces simulations à l’échelle de l’hôpital en mettant en place des simulations simultanées à l’urgence, au bloc opératoire et dans les unités de soins intensifs », ajoute la Dre Nguyen. « Nous travaillons ensemble dans la vraie vie, alors ça semble logique de nous exercer ensemble lors d’une simulation. »