Comment l’histoire d’une hyène, qui a blessé un garçon en Afrique, sert de leçon aux finissants du secondaire

MIKE BOONE, The Gazette

Publié le mercredi 9 mai 2007

Dr House n’est pas le seul médecin à avoir du flair pour le drame.

Tarek Razek n’est jamais blasé. Le chef de l’unité de traumatologie de l’Hôpital général de Montréal a un débit régulier, un synchronisme parfait et un sens du drame qui sait bouleverser un auditoire.

J’ai vu deux fois le Dr Razek à l’œuvre.  En février dernier, quand il a fait une présentation dans le cadre d’un déjeuner de la Fondation du Centre universitaire de santé McGill. Ensuite hier matin, lorsqu’il a monopolisé l’attention à l’école secondaire Lindsay Place, dans un discours censé déstabiliser les étudiants de 5e secondaire, pour les inciter à se comporter de manière responsable lors de leur bal de fin d’études.

Les activités de fin d’études de Lindsay Place commencent le 29 juin dans un hôtel près de l’aéroport. Après, la destination de chacun dépendra de l’attention portée aux paroles du Dr Razek.

Assis à l’auditorium de l’école secondaire au milieu de 240 étudiants, j’ai senti vers le milieu de l’exposé de 40 minutes que les étudiants commençaient à s’agiter. C’est alors que le Dr Razek les a embarqués! 

Il a montré une séquence vidéo prise par une caméra installée sur le tableau de bord d’une fourgonnette dans le cadre d’une étude sur la sécurité sur les autoroutes aux États-Unis. Le conducteur arborait un t-shirt, une casquette de baseball, un sourire fatigué… et pas de ceinture de sécurité.

Tout à coup, la panique s’empare du conducteur alors qu’il commence à perdre la maîtrise de la fourgonnette. Il rebondit d'un bord à l’autre, puis il se retrouve hors de son siège, éjecté vers l’arrière du véhicule, où sa tête frappe la fenêtre latérale.

« Il a été décapité », précise le Dr Razek.

« Oh merd… », a-t-on entendu dans la bouche de plusieurs étudiants.

Maintenant, il les tenait. Tous étaient assis bien droit et on entendait un bourdonnement dans la salle.

Et pour le Dr Razek, ce n’était que le réchauffement!

Natif de Montréal et vivant dans le Mile-End, le Dr Razek a été formé à Philadelphie et a travaillé en Afrique au sein d’une équipe internationale de spécialistes en traumatologie. Il a montré des photos des patients qu’il a soignés au Soudan et en Ouganda.

La première image était le profil droit d'un jeune homme qui a reçu une décharge de fusil dans le visage. Le point d’entrée dans sa joue n’était pas plus gros qu’un bouton charnu.

Un clic de souris a amené à l’écran le profil gauche, montrant la blessure à la sortie. L’horrible image, qui a donné lieu à un autre tollé d’exclamations impressionnées de l’auditoire, ne peut être publiée dans un journal familial. Et je ne décrirai pas non plus la photo que le Dr Razek a montrée d’un jeune garçon de 8 ans blessé par une hyène.

Je ne suis pas complice des projets des étudiants de Lindsay Place, mais je doute qu’ils impliquent un fusil ou une hyène. Cependant, ce que le Dr Razek voulait montrer avec ces photos terrifiantes, c’est que ni lui ni son auditoire ne vivent dans une région du monde minée par la guerre civile ou par la présence de prédateurs animaux.

« J’ai eu de la chance de naître ici et de pouvoir mettre mes compétences en pratique ailleurs dans le monde », a dit le Dr Razek. Il a aussi dit espérer que les diplômés du secondaire deviendraient des citoyens du monde et contribueraient à soulager la souffrance. Mais, pour rester en santé et réaliser leur plein potentiel, ils devront faire des choix, comme porter une ceinture de sécurité et avoir des conducteurs désignés.

Au Québec, l’hyène ne pose pas de problème. Dans le cas de la sécurité automobile, c’est une autre histoire.

À la tête de l’unité de traumatologie de l’Hôpital général de Montréal du Centre universitaire de santé McGill, le Dr Razek fait face tous les jours aux ravages de la route. C’est un peu ironique, dit-il, parce que sa mère a été tuée lorsque sa voiture en panne a été frappée par un camion.

Il a expliqué comment les lois du mouvement de Newton s’appliquent aux passagers non attachés dans une voiture roulant à 120 kilomètres à l’heure qui doit freiner brusquement. Il a dit aux étudiants que les banques d’organes appellent les motocyclistes des « motodonneurs ». « Si vous me voyez pour des raisons professionnelles, ajoute le Dr Razek, c’est que vous serez dans un très mauvais jour. » Il n'est pas neurologue, mais le Dr Razek a donné aux élèves de Lindsay un bon conseil au sujet de leur tête : servez-vous-en, ou vous la perdrez!

Pour obtenir de plus amples informations sur les présentations du Dr Tarek Razek aux étudiants, appelez la coordonnatrice des événements spéciaux du CUSM, Monica McDougall, au 514-931-5656.