Sexe + nourriture + musique = pur plaisir : Des chercheurs du CUSM découvrent le pouvoir du rythme

Par Julia Asselstine

Pas besoin d’être musicien pour savoir que la musique évoque l’émotion. Si vous avez assisté au Festival de jazz de Montréal, vous avez sûrement vu des gens, musiciens ou spectateurs, presque en transe, souriant, se balançant, tapant du pied, les yeux fermés, réagissant instinctivement aux battements et aux rythmes déversés par la scène.

Selon une étude menée par le Dr Robert Zatorre, professeur James McGill en neurosciences à l’Institut neurologique de Montréal, CUSM, et sa collègue la Dre Anne Blood (maintenant chercheuse à l’Université Harvard), ce n’est pas une surprise. Il y a quelques années, ces chercheurs ont décidé d’étudier la musique et l’émotion en utilisant l’imagerie cérébrale. Ils ont constaté qu’il y avait une activité dans certaines régions du cerveau supposément associées au système de récompense, parfois appelé centre du plaisir. D’ordinaire, ce centre est réceptif à un stimulus biologique significatif.

« Si vous prenez un animal affamé et que vous le nourrissez, vous verrez que cette région du cerveau liée aux récompenses est active », explique le Dr Zatorre. « C’est là que le cerveau reconnaît si ce qui se passe maintenant est agréable. Donc, si vous êtes un animal sauvage dans la nature et que vous trouvez quelque chose à manger qui goûte vraiment bon, le système de récompense de votre cerveau vous dira que c’est bon, positif et important pour survivre, et vous incitera à en trouver encore si vous le pouvez. C’est un mécanisme d’auto-guidage. À l’inverse, la douleur est un mécanisme d’évitement. Le sexe stimule aussi le système de récompense. La nourriture et le sexe sont tous deux nécessaires à la survie : si vous ne mangez pas, vous mourrez; et si vous n’avez pas de relations sexuelles, vous ne vous reproduirez pas et l’espèce disparaîtra. »

Le fait que la musique semble mobiliser certains de ces mêmes mécanismes est intéressant, parce qu’il ne s’agit pas, strictement parlant, d’un mécanisme biologique significatif du fait que les humains n’en ont pas absolument besoin pour survivre. Nous pourrions vivre sans musique. Vous ne seriez peut-être pas aussi heureux sans elle, mais ce n’est pas comme la nourriture ou l’eau : vous ne mourrez pas de faim, et vous pourrez continuer à vous reproduire.

Qu’elle soit significative ou non sur le plan biologique, les anthropologues ont déterminé que la musique est présente dans chaque société qui vit sur notre planète, incluant les tribus très primitives d’un point de vue technologique. En outre, une récente enquête indique que la musique se classe parmi les cinq « choses les plus agréables » pour les humains.

« Cela laisse croire que la musique a des racines vraiment très profondes, explique le Dr Zatorre. Elle met à contribution certains des centres primitifs les plus élémentaires de nos cerveaux qui sont en lien avec la survie et le plaisir, la récompense et la motivation. Avant cette étude, les gens pensaient que le plaisir associé à la musique était simplement lié à notre connaissance de la musique. »

Afin d’approfondir cette recherche, des expériences en cours montrent que le principal neurotransmetteur associé à la musique et l’émotion est la dopamine, typiquement la molécule de la « récompense ».

Alors, que vous soyez au Festival de jazz ou à la maison en écoutant votre musicien préféré, récompensez-vous et abandonnez-vous à l’élan spontané, biologique et fortement enraciné qui vous incite à taper du pied, à balancer les hanches ou à fermer les yeux pour mieux succomber au pur plaisir de la musique.