Dépêche en provenance de l'Africa Mercy III no 4 : Irene de Montréal

Mercredi, Mars 28, 2018 - 11:44

Légende : D^r Sherif Emil et D^r Étienne St-Louis en compagnie d’Irene Blotsky

Dépêche n^o 4 – Douala, 25 mars 2018, 20 h 20

Irene de Montréal

Il est 9 h 15 dimanche matin. Étienne St-Louis, résident en chirurgie à McGill, est à mes côtés sur le navire depuis une semaine. Nous avons eu notre lot de difficultés en salle d’opération au cours de cette dernière semaine, et nous terminons notre petit-déjeuner heureux d’avoir assisté à plusieurs miracles depuis notre arrivée. Aujourd’hui, Étienne est de garde, et moi je vais quitter brièvement le navire pour assister à la cérémonie du dimanche des Rameaux au Centre de l’espoir, la résidence qui héberge avec leurs familles les patients de l’Africa Mercy qui se remettent d’une opération ou qui attendent d’être opérés. Mais avant de partir, j’ai décidé de faire quelque chose de différent.

J’ai souvent été interviewé avant et pendant ma mission. Aujourd’hui, c’est à moi de jouer à l’intervieweur. Et je décide de ne pas interviewer un médecin, une infirmière ou un autre professionnel de la santé. J’ai déjà beaucoup écrit sur le travail formidable qu’ils font. J’ai choisi de m’intéresser à une femme qui, aux premiers abords, semble bien loin du milieu hospitalier.

Irene Blotsky vient de terminer le service du petit-déjeuner dans la cuisine de l’Africa Mercy, servant près de 400 membres d’équipage provenant des quatre coins de la terre. C’est une femme pétillante, amusante et humble, l’une des centaines de bénévoles à bord du navire. Irene est ici depuis six semaines, et il lui en reste encore une avant de rentrer à la maison – à Montréal.

Irene a entendu parler de l’Africa Mercy par un article dans le journal Montréal Gazette et a décidé de venir servir. Mais, Irene n’est pas chef, cuisinière, ni serveuse. Elle est infirmière. Elle a fait toute sa carrière à Montréal. Elle a travaillé dans des unités de soins intensifs, auprès des patients hospitalisés, en consultation externe, au CLSC, un peu partout en fait. Après 35 ans, elle a pris sa retraite des soins infirmiers, mais pas du service. Elle est encore bénévole à l’unité d’oncologie de l’Hôpital de Montréal pour enfants tous les mercredis, où elle fait des pâtisseries pour les infirmières qui travaillent dur à soigner certains des patients les plus vulnérables.

Irene est venue sur l’Africa Mercy pour travailler en cuisine, parce qu’après sa retraite, elle n’a pas renouvelé son permis d’exercer et souhaitait servir autrement. Malgré un genou déjà remplacé et un autre qui doit l’être bientôt, elle marche plusieurs kilomètres par jour d’un bout à l’autre de l’immense cuisine. Elle ne veillera peut-être pas sur un seul patient durant son séjour, mais elle se sent intensément proche des patients. Elle sait qu’elle est un élément indivisible de cette communauté qu’elle a rejointe il y a quelques semaines à peine. « Ici, on fait en sorte que chaque personne se sente aussi importante que les autres », me dit-elle. L’esprit de communauté de l’Africa Mercy n’a pas seulement répondu à ses attentes, il les a largement surpassées. Il ne faut pas beaucoup de temps pour qu’un bénévole à bord du navire soit chaleureusement soutenu et soutienne chaleureusement les autres. Irene a eu une vie longue et productive. En plus de son illustre carrière d’infirmière, elle a élevé 3 enfants qui réussissent bien dans la vie, et elle est grand-mère. Mais ici, sur le navire, elle est une étudiante comme nous tous – apprenant constamment de cette communauté aussi unique que le service qu’elle offre. « Je suis une personne transformée, dit-elle, mais je n’ai pas encore réalisé toute l’ampleur de ce que j’ai vu et appris ici. Je reviendrai », dit-elle avec détermination.

Il y a deux jours, la majorité des membres de l’équipage canadien se sont retrouvés pour souper dans un restaurant des environs. L’histoire d’Irene se répète chez tellement d’autres personnes – infirmières, officiers de navire, physiothérapeutes, créateurs de capacités, pharmaciens, ingénieurs biomédicaux, enseignants et bien d’autres. Certains sont ici pour quelques semaines, d’autres depuis des années. Mais tous contribuent à enrichir cette communauté unique de soins et de compassion. Ils sont venus de tous les coins du pays et sont des ambassadeurs canadiens de Mercy Ships. Et ils sont la fierté du Canada. Chacun est une Irene Blotsky sous une couleur ou une autre – sortant de sa zone de confort pour participer à une mission de compassion.

Je suis vraiment enchanté d’avoir rencontré et appris à connaître Irene. Maintenant, j’ai quelqu’un à l’Hôpital de Montréal pour enfants qui connaît et comprend la culture de l’Africa Mercy. À chacune de nos rencontres, nous nous enlacerons chaleureusement et nous nous souviendrons de ce lieu si particulier où nous avons fait connaissance.

Le docteur Sherif Emil [1] est chirurgien pédiatre et directeur de la division de chirurgie thoracique et de chirurgie générale pédiatrique à l’Hôpital de Montréal pour enfants. Pendant 3 semaines, il fera partie de l’équipage bénévole de l’Africa Mercy III, amarré en ce moment à Douala, Cameroun. L’Africa Mercy est le plus grand navire-hôpital civil au monde qui a pour mission d’apporter espoir et guérison aux dizaines de milliers de populations défavorisées dans le monde.

2018

Dépêches en provenance de l’Africa Mercy III no 1: Si vous voulez aller loin… [2]

Dépêches en provenance de l’Africa Mercy III no 2 : Transformations [3]

Dépêches en provenance de l’Africa Mercy III no. 3 : Les anges de la compassion [4]

2017

Dépêches du navire-hôpital Africa Mercy no 1 : Le bout de la terre [5]

Dépêches du navire-hôpital Africa Mercy no 2 : Que demander de mieux ? [6]

Dépêches du navire-hôpital Africa Mercy no 3 : Héros de l’Afrique [7]

Dépêches du navire-hôpital Africa Mercy no 4 : La puissance de la camaraderie [8]

Dépêches du navire-hôpital Africa Mercy no 5 : Il faut un navire de l’espoir [9]

Dépêches du navire-hôpital Africa Mercy no 6 : Jane [10]

2016