Grammy Awards et BRIT Awards : Marika Anthony-Shaw de L’HME gagne gros

Par Pamela Toman

Plusieurs en rêvent, mais seule une poignée d’artistes et de groupes de renom ont la chance de savourer un moment de gloire sous les projecteurs des Grammy Awards, et un moins grand nombre encore peut se vanter d’avoir été honoré lors du même événement.
 
Le 13 février 2011, l’unique Marika Anthony-Shaw de L’HME a eu la chance d’épingler ces deux exploits à son tableau de chasse lorsque son groupe, Arcade Fire, a gagné le prix de l’album de l’année. À peine deux jours plus tard aux BRIT Awards 2011, le groupe a gagné le prix du meilleur album international et le prix du meilleur groupe international, suscitant excitation et fierté à la grandeur de la ville de Montréal et du Canada.
 
Malgré son horaire chargé, Marika a pris le temps de nous parler de son travail à L’HME, de son engagement à l’égard des soins de santé et de la recherche, et de ce que représente le fait de gagner le prix le plus prestigieux de l’industrie.
 
Q. À quel âge avez-vous commencé à jouer du violon et de l’alto? Est-ce que vous jouez d’autres instruments?
 
J’ai commencé à jouer du violon à 4 ans. Je viens d’une famille de musiciens. Ma soeur est musicienne professionnelle et joue du violoncelle; je lui ai toujours envié cette sonorité riche et profonde. Alors, dès que j’ai été assez grande pour atteindre les notes, j’ai commencé à jouer de l’alto. C’est un instrument qui a une sonorité plus douce, plus près de celle du violoncelle. En grandissant, j’ai aussi joué du piano, j’ai beaucoup chanté dans des chœurs, mais j’ai étudié l’alto classique à l’université, c’est donc l’instrument pour lequel j’ai une formation plus formelle.
 
Q. Parlez-moi du temps que vous avez passé à L’HME. Comment en êtes-vous arrivée à travailler ici et qu’avez-vous fait? Avec qui avez-vous travaillé le plus étroitement?
 
J’ai commencé à travailler à L’HME comme coordonnatrice de la recherche au département d’urgence en 2008. Je participais à la coordination de tous les projets de recherche menés au département, allant des grandes études multicentriques pancanadiennes du réseau PERC (groupe de recherche en urgence pédiatrique du Canada) aux petits projets de recherche locaux et aux recherches postdoctorales; j’ai aussi participé à l’embauche et à la formation des nouveaux assistants de recherche. L’HME a l’une des urgences les plus occupées en Amérique du Nord, ce qui pose de sérieux défis pour faire de la recherche; tout le monde est TELLEMENT occupé tout le temps. D'un autre côté, ça offre aussi des perspectives de recherche incroyables en raison du grand nombre de patients qui s’y présentent. J’ai essayé de bâtir sur ces perspectives et d’impliquer davantage les infirmières, le corps professoral et les employés du département.
 
J’ai d’abord travaillé avec le Dr Maala Bhatt et le Dr David McGillivray, qui ont tous deux été des mentors incroyables. J’ai tellement appris d’eux, et de leur passion pour des soins fondés sur de solides résultats cliniques. Cependant, mon rôle m’amenait à travailler avec presque tout le monde du département. Quant aux projets, à ma première année, nous avons travaillé sur des études portant sur le diagnostic d’une pneumonie bactérienne, la gastro, les soins de l’asthme, les cathéters urinaires… vraiment des projets très variés. Le Dr Bhatt est le chercheur principal d’une étude multicentrique très active sur la surveillance des événements indésirables touchant la sédation au département d’urgence; après un an passé à la coordination pour l’ensemble du département, je me suis concentrée principalement sur cette étude.
 
C’était formidable d’être impliquée dans une recherche qui aura des répercussions sur l’avenir et qui peut vraiment améliorer les soins; j’ai trouvé ça fascinant de participer à un projet dès le début, lorsqu’il n’y a qu’une idée sur papier, jusqu’à la phase de mise en œuvre.

Même aujourd’hui, je peux encore m’impliquer dans certains aspects de la recherche de Dr Bhatt et je suis encore en contact avec l’équipe de recherche.
 
Q. Qu’aimiez-vous de votre travail à L’HME?
 
J’ai des sentiments incroyables au sujet de l’hôpital, et en particulier du département d’urgence, et je me considère très chanceuse d’avoir travaillé avec les personnes qui y sont. J’ai tellement appris, tout le monde travaille ensemble, en équipe, et j’adore ça. Je me sens fière des recherches qui s’y font; elles sont vraiment importantes.
 
Q. J’ai aussi lu que vous aviez enseigné la musique à l’École secondaire Lindsay Place. C’est assez différent du travail dans un hôpital!
 
Oui, c’est peu après la fin de mes études de premier cycle. Le programme d’orchestre de l’école Lindsay Place cherchait un directeur; moi, j’avais fait beaucoup d’enseignement à McGill et j’adorais cela, alors j’ai sauté sur l’occasion d’enseigner dans une école secondaire. C’était un défi formidable, énorme, mais très satisfaisant à bien des égards. Cependant, je faisais encore beaucoup de spectacles, et quand la tournée a repris, je ne pouvais pas faire les deux. Quand j’ai commencé à enseigner, je faisais mes cours préparatoires pour l’école de médecine à McGill; j’ai toujours été très intéressée par la santé et la médecine. Alors, quand je suis revenue de la tournée Neon Bible avec Arcade Fire en 2008, j’ai pris un congé et j’ai décidé de m’engager en travaillant en santé, et L'HME m’offrait une occasion formidable d’apprendre sur la recherche, la médecine et le système de santé en général. Ayant déjà fait de la recherche, j’avais beaucoup de connaissances exportables.

Q. Comment avez-vous commencé à jouer avec Arcade Fire?
 
J’ai commencé à travailler avec le groupe durant l’enregistrement de Neon Bible (le second album d’Arcade Fire, paru en 2007), mais c’étaient mes amis depuis longtemps, alors j’étais déjà dans leur entourage avant. C’est depuis ce temps que j’enregistre et que je fais des tournées avec eux.

Q. Vous avez aussi un autre groupe, Silver Starling. Comment arrivez-vous à jongler avec ces deux engagements?
 
Mon mari fait partie de Silver Starling, alors c’est peut-être là que je trouve mon équilibre! Je suis très fière du groupe (dont font aussi partie Peter X et Gab Lambert). Quand je me suis retrouvée à la maison durant 2 ans entre les albums d’Arcade Fire, mon mari Marcus et moi avons pu nous concentrer un peu plus sur Silver Starling, et comme nous avons un studio à la maison, nous avons pu faire beaucoup d’enregistrements. Mais, c’est Marcus qui est vraiment le cœur et l’âme de ce groupe, je ne suis que la cerise sur le sundae!
 
C’est vrai que c’est un défi d’équilibrer les deux, mais j’essaie de faire du travail multitâche, et la technologie aide. Nos ordinateurs nous permettent d’enregistrer à distance et d’échanger des idées. Il est important de bien synchroniser le tout. Dans l’ensemble, l’équilibre se fait assez bien et j’espère que les choses pourront continuer ainsi.

Q. Parlez-nous des Grammy. Je pense que c’était votre première présence à l’événement. Comment vous sentiez-vous là-bas? À quoi ressemblait l’atmosphère?
 
Le groupe avait déjà été aux Grammy, mais dans mon cas, c’était une première. L’expérience a définitivement surpassé toutes les attentes que je pouvais avoir! C’était un très bon spectacle et c’était extraordinaire d’y être. Pour moi en fait, c’était surréaliste d’être sur scène et de savoir que mes idoles, comme Bob Dylan et Neil Young, étaient dans la salle. C’était vraiment cool.

Q. Quelle a été la plus belle partie de la soirée pour vous?
 
Pour moi, tout est toujours question de musique. Jouer et faire partie de quelque chose de significatif était extraordinaire. Nous ne nous attendions absolument pas à gagner ce prix. Après notre prestation, nous ne pouvions pas retourner tout de suite à nos sièges et nous étions regroupés sous la scène. Quand Barbara Streisand a annoncé que nous avions gagné, on pouvait voir qu’elle n’avait aucune idée de qui nous étions! C’était vraiment amusant. Faire partie de ce moment là et me produire sur scène ont été pour moi de grands moments de la soirée. En plus, j’ai même eu droit au poing brandi du karate kid en personne (Jaden Smith) en coulisse après notre prestation… est-ce que ça compte?

Q. Deux jours plus tard, vous étiez à la cérémonie des Brit Awards à Londres. Comment était cette expérience?
 
Le lendemain des Grammy, nous sommes allés directement à l’aéroport Heathrow, puis de là, aux Brit Awards à Londres. Nous étions plutôt fatigués, mais plusieurs autres groupes et artistes participaient aux deux cérémonies et étaient là aussi. La formule des Brit Awards est un peu différente : on est assis à des tables où on nous sert un souper; la soirée a donc un caractère plus convivial, ce qui est super. Je n’avais pas encore digéré le fait que nous avions gagné un Grammy, alors quand on a gagné deux autres prix, j’étais sous le choc; c’était surréaliste.
Q. Est-ce que votre succès a changé des choses?
 
Je ne pense pas que ça change quelque chose entre nous, à l’intérieur du groupe. Les décisions ne se prendront pas différemment; c’est juste quelque chose d’extraordinaire et de très excitant.

Q. Est-ce que votre succès veut dire que vous pouvez maintenant consacrer 100 % de votre énergie à la musique?
 
Je fais de la musique parce que j’aime ça, et ça fait partie de moi. Mais, je retire aussi beaucoup de satisfaction à travailler directement avec les gens, dans mon travail à L’HME, ainsi qu’avec l’organisme sans but lucratif Partenaires pour la santé. J’essaie de donner le meilleur de moi-même dans chacun de mes projets, et je me considère très chanceuse d’avoir toutes ces possibilités.

Q. À quelle fréquence pensez-vous séjourner à Montréal?
 
Montréal, c’est chez moi. Nous allons voir ce qui va se passer avec les tournées dans l’avenir, mais je veux profiter des pauses entre les tournées pour mettre mon temps libre de nouveau au service des autres ici, dans notre ville.

Q. Que vous réserve l’avenir?
 
Je travaille au jour le jour, alors pour l’instant, je planifie la tournée avec Arcade Fire après une petite pause, puis je continuerai à travailler sur ma musique avec Silver Starling. Je travaille également avec l’organisme Partenaires pour la santé et j’espère éventuellement retourner à l’école.

Q. Si la passion de la scène venait à vous quitter, reviendriez-vous travailler à L’HME?
 
J’espère, s’ils veulent bien me reprendre (rires).
Pour plusieurs d’entre nous à L’HME, les succès de Marika évoquent un sentiment de fierté et de joie pour une collègue qui n’oublie jamais l’importance de redonner aux autres. En notre nom à tous, ici à L’Hôpital de Montréal pour enfants, félicitations Marika et Arcade Fire!
 
Référence photographique : David Lichterman